L'histoire officielle des humains
L'histoire de la République tchèque
est à la fois celle de la Bohême, de la Moravie et de la Tchécoslovaquie
à partir de 1918.
À partir du XIe siècle, les histoires de la Bohême et de
la Moravie se confondent puisque c'est en 1029 que la Moravie fut rattachée
à la Bohême.
Les deux régions historiques avaient été
peuplées dès le Ier s. apr. J.-C. par des Slaves et avaient été
évangélisées par Cyrille et Méthode dès le
IXe siècle.
C'est durant ce siècle que la Bohême est rattachée au royaume
de Grande-Moravie sous le règne de Svatopluk (870-894). En 894, à
la mort de Svatopluk, la Bohême et la Moravie sont séparées
et la Moravie est envahie par les Magyars. C'est au XIVe siècle que la Bohême est à son apogée
et que son royaume est agrandi. C'est aussi durant ce siècle qu'est fondée
l'université de Prague (1348). Sous les règnes de Charles IV
(1346-1378), de Venceslas IV (1378-1419) et de Sigismond de Luxembourg
(1419-1437) la Bohême connaît le mouvement de réforme dirigé
par Jan Hus, qui conduit à une crise religieuse et sociale puis à
la guerre civile. À l'issue de cette guerre, après la défaite
de la Montagne-Blanche (8 novembre 1620), la couronne quitte la dynastie
des Luxembourgs pour échoir aux Habsbourgs, qui la conserveront jusqu'en 1918.
En 1618, les nationalistes protestants se soulèvent contre la politique
de germanisation et le non-respect de la politique religieuse: c'est le début
de la guerre de Trente Ans. Des émeutes se produisent à Prague
en 1848, comme dans le reste de l'Europe. De 1848 à 1916,
sous le règne de l'empereur François-Joseph, deux courants concernant
l'affirmation de l'identité slave s'affirment: d'une part l'austro-slavisme,
d'autre part le néo-slavisme favorable au séparatisme.
Le début de la Première Guerre mondiale
permet une accélération du processus d'émancipation des
peuples slaves dans l'empire d'Autriche-Hongrie comme les Tchèques et
les Slovaques. La Tchécoslovaquie est fondée en 1918 et est
constituée à l'époque de Tchèques, de Moraves et
de Slovaques pour les deux tiers, d'Allemands, de Magyars, de Ruthènes
et de Polonais pour le reste. Elle a à sa tête Masaryk comme président
de la République. En 1935, la jeune République signe un pacte
d'assistance mutuelle avec l'Union soviétique. À la même
date, alors que Benes succède à Masaryk à la présidence
de la République, l'agitation des minorités allemandes des Sudètes
débute et les Slovaques affirment leur volonté d'autonomie: cela
conduit à une crise internationale en partie résolue par la conférence
de Munich et l'annexion des Sudètes par le IIIe Reich (29 et 30 septembre 1938). Le 15 mars 1939,
l'armée allemande entre dans Prague. Une résistance s'organise
alors dans le pays (assassinat du Reichsprotektor Reinhard Heydrich en 1942)
et à Londres (gouvernement en exil animé par Benes). Le 9 mai,
le protectorat de Bohême et Moravie est libéré, la Tchécoslovaquie
se reconstitue, amputée de la Ruthénie subcarpatique, qui revient
à l'URSS ; conformément aux clauses du traité de Postdam,
les minorités allemandes des Sudètes sont déportées.
Après un coup de force, le communiste K. Gottwald devient président
de la République.
En 1968, le printemps de Prague, qui est la manifestation
d'un socialisme plus humain et dont la figure emblématique est Alexander
Dubcek, est réprimé: les troupes du pacte de Varsovie, à
l'exception de celles de la Roumanie, envahissent le pays. Le 1er janvier 1969, la Tchécoslovaquie devient un État
fédéral. La même année, Gustáv Husák
remplace Alexander Dubcek. Dès 1987, des manifestations contre le
régime socialiste se déroulent à l'initiative du Forum
civique et des membres de la Charte 77, notamment Václav Havel. En novembre 1989,
à la suite d'une manifestation d'étudiants violemment réprimée,
commence la «révolution de velours» qui conduira à
la chute du régime communiste et à l'élection à
la présidence de la République de Václav Havel. Le 1er janvier 1993, la
Tchécoslovaquie disparaît, laissant place à la République
tchèque et à la Slovaquie, deux États distincts.
En décembre 1997, V. Klaus, Premier ministre depuis 1992,
est contraint à la démission à la demande du Président
V. Havel, à la suite de la révélation d'un scandale
concernant le financement occulte de son parti, le Parti démocrate civique
(ODS), lors des grandes privatisations. V. Havel (réélu le 20 janvier 1998)
nomme alors J. Tosovsky, ancien gouverneur «sans parti» de
la Banque nationale, Premier ministre par intérim.
La République tchèque a connu pour la première fois, en juin 1998,
l'alternance politique. Lors des élections anticipées (18 et 19 juin),
les sociaux-démocrates, emmenés par Milos Zeman, ont remporté
la victoire avec 32,31 % des voix, mais ils n'ont pu former de majorité
sans les partis de centre-droit, qui conservent la majorité au Parlement.
Le nouveau gouvernement, dont M. Zeman est devenu Premier ministre le 22 juillet 1998,
devra faire face, non seulement à une crise politique, mais aussi à
un profond malaise social dû notamment à la dégradation
des conditions de vie et de travail liée à la transition. La révélation
des scandales économiques et de l'étendue de la corruption semble,
en outre, avoir accru la défiance des Tchèques vis-à-vis
de la classe politique, et de la politique en général.
Une part de la jeunesse, exclue de la transition, a exprimé son mécontentement
à plusieurs reprises en 1997 et 1998. Une autre question très
préoccupante reste celle de la minorité tsigane qui, en dépit
des mesures prises par le gouvernement (comme par exemple la nomination d'un
délégué de l'État en charge des droits de l'Homme
en octobre 1998) est toujours en butte au racisme ordinaire d'une
partie de la population et fait régulièrement l'objet d'agressions
de la part de petits groupes s'inspirant d'une idéologie fascisante.
L'European Roma Rights Center
recense, depuis 1990, une agression tous les deux jours sur un membre de
la communauté rom et, dans son rapport annuel au Congrès pour
l'année 1998, le ministère des Affaires étrangères
américain insiste sur le fait que le problème de la discrimination
ethnique perdure malgré l'introduction, en avril 1996, d'une
insuffisante modification de la loi de 1993 sur la citoyenneté.
Un nombre de plus en plus élevé de membres de la communauté
rom cherchent à quitter le pays et les demandes d'asile se multiplient
à destination du Canada, de la Grande-Bretagne et d'autres pays.
Seules les relations internationales semblent s'améliorer, depuis que
la République tchèque a rejoint l'OTAN aux côtés
de la Hongrie et de la Pologne, le 12 mars 1999.
Les intellectuels tchèques ont joué un rôle majeur pendant l'épisode du printemps de Prague, se faisant les porte-parole des aspirations populaires. Au cours de la décennie 1970, ils furent les principales victimes de la «normalisation». De nombreuses oeuvres furent interdites, comme celles de Karel Kosik, de Václav Havel et de Pavel Kohout. De même, les cinéastes de la Nouvelle Vague tchécoslovaque furent contraints à l'exil, comme Milos Forman et Ivan Passer. En dépit de ces persécutions, nombre d'entre eux continuèrent de jouer un rôle actif dans la société, notamment à travers la création de la Charte 77, publiée le 1er janvier 1977. L'objectif de la Charte 77 était de faire respecter les lois en vigueur, en se réferrant à la Déclaration universelle des droits de l'homme de l'ONU et à la Constitution tchécoslovaque. Parmi ses porte-parole, on retrouve des personnalités comme J. Patocka, mort en mars 1977 après de longs interrogatoires, V. Benda (1947-1999), J. Dienstbier et V. Havel, qui furent plusieurs fois condamnés à des peines de prison entre 1979 et 1989.
© Hachette Multimédia / Hachette
Livre, 1999